202010.07
Fermé
0

Le droit est désarmé sans preuve. Et c’est là que le recours à un enquêteur privé va s’avérer précieux. En effet, les rapports des détectives privés sont recevables à condition de respecter certaines règles. Ces dernières relèvent de la loi, de la jurisprudence, mais aussi du code de déontologie de la profession.

Les textes applicables à la mission de l’enquêteur sont favorables à la recevabilité


Si l’activité d’enquêteur privé est réglementée par les articles L621-1 et suivants du code de la sécurité intérieure, ces textes ne parlent pas de la recevabilité du rapport. L’article L621-1 mérite cependant qu’on s’y attarde. En effet, il précise que le détective privé peut enquêter sans révéler, ni sa profession, ni l’objet de son enquête.

Un texte très précieux


Ceci signifie à contrario que la cible de l’enquête ne pourra se prévaloir du fait qu’elle ignorait l’existence d’une telle mission pour obtenir le rejet du rapport. Ainsi, la confidentialité de la mission du détective est protégée par la loi. Il faut cependant mettre un bémol à cette affirmation lorsqu’on se trouve dans le périmètre du droit du travail. Néanmoins les règles de base de la recevabilité du rapport d’un professionnel de l’enquête privée sont assez simples.

Le principe de la liberté de la preuve


Le rapport du détective privé relève du régime des preuves. Comme ces dernières, il doit répondre à des critères de loyauté et de légalité en matière de collecte des éléments susceptibles d’être produits en justice.

En effet, très tôt, la justice a admis la recevabilité du rapport du détective privé. Dès le 7 novembre 1962, la seconde chambre de la Cour de Cassation (pourvoi n°1020) a déclaré recevable le rapport de Robert Torino, détective privé, dans un dossier de divorce. Depuis, les décisions de justice les acceptent régulièrement.

Le fait que le détective soit rémunéré par une des parties est sans emport


Bien entendu, certains ont tenté de faire écarter les preuves rassemblées au motif que le professionnel qui y a procédé est appointé par l’une des parties. L’argument a été balayé par la Cour de Cassation par arrêt du 12 octobre 1977 (pourvoi n°76-13.744). Néanmoins la preuve doit être loyalement recueillie.

Le rapport ne doit pas porter atteinte de façon disproportionnée à la vie privée


La Cour Européenne des Droits de l’Homme a développé le droit à la preuve. Ainsi la CEDH a estimé que la justice devait tenir compte des intérêts de toutes les parties.

palais de justice

Pour elle, il convient de mettre dans la balance le droit d’étayer une prétention légitime et celui de la protection contre les atteintes à la vie privée (CEDH L.L.C. ./. France requête n° 7508/02). Dans son sillage, la Cour de Cassation a développé une jurisprudence, du moins en matière de droit civil, qui tente de concilier au mieux les intérêts en présence.

Ainsi, lors d’un conflit opposant un assureur à son assuré, la première chambre civile de la Cour de Cassation a estimé le 25 février 2016 (pourvoi n°15-12403) que « Le droit à la preuve ne peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée qu’à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi. »

Le droit commercial


La preuve en matière commerciale est bien plus libre, notamment lorsqu’il s’agit de deux sociétés. En effet, selon l’arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation du 17 mars 2016 (pourvoi n°15-14072), la notion d’atteinte à la vie privée d’une société n’existe pas.


Le rapport d’enquête privée en droit du travail

Cette branche du droit est très protectrice du salarié et la collecte de preuves par un enquêteur privé est plus délicate.

En effet, la jurisprudence est très stricte et rejette presque systématiquement les filatures des salariés en les qualifiant de preuves illicites, attentatoires à la vie privée et aux droits fondamentaux des salariés.

Droit du travail

En fait, pour que le rapport d’enquêteur privé soit recevable devant les juridictions du travail, trois conditions doivent impérativement et cumulativement être respectées.

Le premier critère est la proportionnalité des moyens mis en œuvre, ensuite il y a le respect de la vie privée du salarié.

Enfin et surtout le salarié doit être préalablement informé qu’il peut faire l’objet d’une telle enquête. Or, c’est ce dernier élément qui fait généralement défaut.

Comment pallier l’absence d’information du salarié ?


Lorsque les faits peuvent revêtir une qualification pénale, l’employeur peut saisir le parquet et du fait de la liberté de la preuve en matière pénale, y joindre le rapport de l’enquêteur privé.

Si les faits sont uniquement de nature non-pénale, ce document sera la base incontournable pour faire établir un constat d’huissier efficace.